Le bassin du cours Beaumont vers 1910, où fut célébrée 40 ans plus tôt l'arrivée de l'« or blanc ».

Histoire

Quand l'eau de la Durance arriva à Aubagne

Au mois de juin 1870, une véritable révolution s’opère à Aubagne. L’eau de la Durance coule dans la ville. Abondée depuis par celle du Verdon, cette même eau alimente toujours notre réseau en eau potable.

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Le 19 novembre 1849, à l’issue d’un chantier titanesque dirigé de 1838 à 1848 par l’ingénieur Franz Mayor de Montricher, le canal de Marseille amène l’eau de la Durance au plateau Longchamp. Cette évolution vitale, tant elle soulage les Marseillais du tourment des jours de sécheresse, est devenue l’un des grands exemples de l'ingénierie du XIXe siècle par le nombre et la diversité de ses infrastructures, canalisations, aqueducs, bassins et autres ouvrages, tout au long de son tracé de 80 km.

Dès 1846, le soutien actif du marquis de Barthélemy, élu deux ans plus tard député des Bouches-du-Rhône, conduit le ministère de l’Intérieur à examiner une concession d’eau pour Aubagne. Mais les bouleversements politiques, économiques et sociaux – krach boursier de 1847, Révolution de 1848, avènement de la Seconde République puis du Second Empire – ne sont pas sans conséquence en France sur les projets en cours. Il faudra attendre 1864 pour que l’État autorise le prolongement du canal de Marseille vers Aubagne, allouant à cette branche 1 m3 d’eau par seconde.

Les travaux d’aménagement, qui s’achèveront dans leur première phase à Aubagne en 1873, font entrer le canal dans la ville par l’aqueduc de la Thuilière. Le 5 juin 1870, les Aubagnaises et les Aubagnais célèbrent enfin autour du bassin du cours Beaumond, agrandi pour l’occasion, l’arrivée de l’« or blanc ». Une inauguration en grande pompe qui s’achève sur un orage de tous les diables, à l’origine, dit-on, du dicton: « A Aubagno, quand plòu si bagnon » (À Aubagne, quand il pleut, on se baigne).

Les habitants s’équipent de « caisses à eau » pour la stocker. D’une branche du canal à l’autre, par siphons, conduites et rigoles, l’eau de la Durance circule sur le territoire communal et remplit bassins et fontaines, du Pin Vert à la plaine agricole des Solans et de Napollon, de la colline qui borde le parc Jean-Moulin aux Espillières ou à Fenestrelles. L’eau du bassin de la gare, construit à la jonction du chemin de la Louve et de la route d’Eoures, alimente les locomotives à vapeur.

Nous ne sommes là qu’à l’aube de la distribution d’eau, à Aubagne comme dans les autres villes de France, à pression très faible, où chacun est prié de la puiser en quantité raisonnable. Une économie de l’eau qui vient nous rappeler que sa moderne abondance au robinet ou sous la douche ne la rend pas moins précieuse.

Source : « Aubagne au fil de l’eau », une brochure des Amis du Vieil Aubagne, parue en 2003 et rééditée en 2013.